Les Fantômes de l’Amérique : Louise Erdrich dévoile la puissance des livres dans son dernier ouvrage, ‘La Sentence’.

Les Fantômes de l’Amérique : Louise Erdrich dévoile la puissance des livres dans son dernier ouvrage, ‘La Sentence’.

Louise Erdrich, la lauréate du Prix Pulitzer 2021 pour « Celui qui veille », continue d’explorer les racines et les démons de l’Amérique avec son dernier roman, « La Sentence », publié par les éditions Albin Michel le 6 septembre. Ce roman, qui a été sélectionné pour le prix Femina du roman étranger, offre un regard perspicace sur l’ADN des États-Unis.

L’histoire se déroule autour de Tookie, une quadragénaire d’origine amérindienne condamnée à soixante ans de prison pour son implication présumée dans un vol de cadavre lié au trafic de stupéfiants. À sa libération conditionnelle, Tookie trouve un emploi dans une librairie spécialisée dans la culture amérindienne à Minneapolis, dirigée par Louise, une patronne discrète. Dans cette nouvelle vie, Tookie trouve du réconfort et un équilibre entre sa passion pour les livres et son amour pour Pollux, son « ami tribal », un ex-policier qu’elle a épousé après sa sortie de prison.

Le récit prend une tournure mystérieuse lorsque Tookie commence à ressentir la présence de Flora, une cliente décédée, dans les rayons de la librairie. Alors que le monde est secoué par la pandémie et les protestations suite à l’assassinat de George Floyd par un policier, le fantôme de Flora hante Tookie, faisant ressurgir ses vieux démons.

Erdrich, une figure emblématique du mouvement de la « Renaissance amérindienne », mêle habilement conte merveilleux, peinture historique et réflexion sociologique et ethnologique. À travers l’histoire de Tookie, elle plonge au cœur de la culture, de l’âme et de l’esprit d’un peuple dévasté par la colonisation.

Tookie, en tant que narratrice, réfléchit sur la grandeur de son peuple malgré des siècles d’effacement et de souffrance. Elle souligne la complexité de la quête identitaire des Indiens, contraints de puiser ici et là pour définir leur identité dans une culture de remplacement imposée par l’impérialisme.

Le roman intègre l’actualité récente, notamment la crise sanitaire et l’assassinat de George Floyd, vus à travers les yeux de Tookie. Erdrich tisse ces éléments dans un récit captivant, offrant une profondeur sans limites et explorant une multitude de façons de penser, de résister et de se révolter.

Au cœur de l’œuvre se trouve la langue, choisie avec soin par Tookie. La romancière explore les significations multiples du mot « sentence », soulignant l’importance des mots dans la vie de son protagoniste. De plus, Tookie exprime la nécessité pour les Indiens de préserver les formes complexes de rapports humains héritées de leurs langues maternelles.

« La Sentence » se termine par la « liste totalement partiale des livres préférés de Tookie », invitant les lecteurs à poursuivre l’aventure littéraire. Erdrich, avec son écriture éblouissante, offre un roman profond, tentaculaire et étrange, révélant la richesse et la complexité de l’humanité. « La Sentence » est un voyage captivant à travers l’histoire, la culture et l’âme d’un peuple résilient face à l’adversité.